Le paradoxe Maroc et le besoin de clarté !

Publié le par ali R

Le paradoxe Maroc et le besoin de clarté !
 
Le Maroc est entré depuis l’expérience de l’alternance de 1998, dont le point de départ était l’accord sur la constitution de 1996, dans une phase transitoire communément appelé « transition démocratique ». L’essence même de ce consensus historique a été de créer un climat de confiance entre toutes les forces du pays sur un contrat – pacte conventionnel non institutionnalisé par ailleurs – ayant pour but de réaliser un socle de réformes et de bases pour justement instituer la Démocratie, le progrès économique, culturel et social.
 
C’est dans cette perspective que nous, socialistes de l’USFP, avons conçus l’étape de l’alternance. Nous voulions, en compagnie des autres forces politiques du pays, instaurer le Maroc pour lequel nous militions, un Maroc prospère, solidaire, démocratique, moderne et égalitaire. A cet égard, l’expérience des 10 dernières années est riche dans la mesure où l’exercice, ou tout au moins la participation à l’exercice, de la gouvernance nous a enseigné beaucoup de bonnes choses : la complexité du contexte marocain, l’énorme force de la résistance aux changement, la difficulté de mettre la théorie en pratique, …
 
Aujourd’hui, nous assumons pleinement notre engagement dans les divers chantiers ouverts au Maroc depuis 1998 et qui ont particulièrement métamorphosé notre pays et aidé à l’amélioration de la perception du Maroc par ses citoyens et par les observateurs étrangers, et nous sommes à cet égard fier et à la fois modeste envers cette société de laquelle notre mouvement est né. Nous avouons aussi avec grand courage que nous avons commis des erreurs. Des erreurs de communication, de tactique, de stratégie, … Nous nous sommes éloignés, par bonne intention, de la société, de ses soucis quotidiens, nous étions emportés par l’euphorie de certaines avancées, nous avons été trompés sur la réelle volonté de certains de s’inscrire dans cette marche du changement, …
 
Bref, mon propos aujourd’hui, n’est pas un diagnostic d’une étape, largement commenté par nos militants, nos sympathisants et nos adversaires. Ce qui motive mon écrit aujourd’hui, c’est cette incapacité à comprendre le Maroc d’aujourd’hui. L’hésitation, avançons un pas et reculons un pas, le manque de clarté, le manque d’audace, … c’est le phénomène qui m’interpelle.
 
La banque mondiale, dans un récent rapport, a avoué son incapacité à expliquer le phénomène de croissance économique au Maroc. Dans ce rapport, la BM argumente par l’exemple de pays ( Tunisie, Afrique subsaharienne, Indonésie, … ) ayant réalisé presque moins que la moitié des réformes engagées au Maroc et réalisant plus que le double de sa croissance !
Dans la même logique des choses, un récent rapport de l’ONG des droits de l’homme Human Rights Watch exhibe un autre paradoxe : « Le Maroc continue de présenter un bilan mitigé en matière de droits humains. Il a opéré de grands progrès dans le traitement des exactions commises par le passé, a accordé un espace considérable à la dissidence et à la contestation publiques et a réduit les inégalités entre hommes et femmes dans le code de la famille. Mais les autorités, aidées par des tribunaux complaisants, continuent de faire usage d’une législation répressive pour punir les opposants pacifiques, en particulier ceux qui violent les tabous ».
 
Cette posture marocaine est palpable aussi sur plusieurs niveaux :
 
  1. Politique : un gouvernement politique sous YOUSSOUFI, un gouvernement de dossiers sou JETTOU et un gouvernement inclassable sous ELFASSI ( classification M. CHAWKI sur Alittihad alichtiraki ).
  2. Economique : Libéralisation des prix contre compensation généralisée de certains produits de base.
  3. Socioculturel : Modernisme avéré ( Moudawana, IER, … ) contre immobilisme, conservatisme et recul même ( poursuite de journalistes, tergiversations dans la définitions et l’adoption des valeurs universelles, … ).
 
Notons essentiellement que ce paradoxe et cette hésitation n’ont pas été caractéristique d’un seul acteur ( Makhzen, conservateurs, … ), il a aussi touché la gauche. Hassan TARIQ a bien résumé ce constat dans un article fort intéressant ( Alittihad Alichtiraki du 31/01/2008 ) : « …la gauche marocaine … n’a pas produit des alternatives de programmes et politiques ayant une base théorique et idéologique différentes et convenables à l’époque, ce qu’il l’a acculé à intercepter le signal de la transition démocratique, sans clarification de son contenu et de ses outils, et ceci a semé le brouillard et a biaisé les orientations politiques et idéologiques de la gauche » ( traduction de l’auteur de cet article ). J’avais également souligné une idée semblable dans mon article « Epoque politique pleinement consommée » ( Alittihad Alichtiraki du 05/10/2007 et Libération du 10/10/2007 ) : «…Pour la gauche, dont la mission principale est d’être le principal précurseur d’idées et de débat, est aujourd’hui devant un grand carrefour de choix politiques. … Il faut marquer l’instant, faire une réelle évaluation de cette époque consommée et consumée. Une évaluation libre, intellectuelle, fédératrice et positive afin d’instituer à une nouvelle ère. Le temps du consensus est révolu, il est temps de prendre son courage par la main et d’aller de l’avant ».
 
Alors que nous, socialistes de l’USFP, préparons notre 8ème congrès, nous avons une énorme responsabilité : Evaluer et évoluer dans la clarté ! Pour les jeunes, espoir du Maroc, mais aussi aux moins jeunes, nous devons proposer un projet de société clair, sans ambiguïtés, partant de nos valeurs de gauche socialistes et plus généralement des grandes valeurs d’humanisme et de démocratie et faisant apparaître des choix intelligibles.
 
Et ceci va avec cela, nous devons exiger de tous une clarté sans tergiversation sur les grands choix du Maroc. Il n’est plus toléré d’hésiter. Le consensus fait partie désormais du passé !
 
Mounir BENSALAH.
Militant USFP.
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F
attendre la clareté au maroc c'est comme attendre la neige tombe au sahara
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